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Viande bovine

Export, marchés publics et segmentation : le triptyque pour sauver la filière


Politique et syndicats le 08/02/2016 à 07:25
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Au congrès de la FNB, qui se tenait à Bourg-en-Bresse les 3 et 4 février, trois leviers structurels, en plus de la remontée urgente des prix, ont été avancés au cours des débats : le développement de l'export, la conquête des marchés publics et une nouvelle segmentation des produits proposés aux consommateurs. Mais pour « sauver la filière viande et ses éleveurs », ce triptyque doit être mis en œuvre rapidement.

Outre la question de la remontée urgente des prix du kilo de carcasse, les producteurs de bovins viande doivent travailler – tout aussi rapidement – avec les transformateurs et distributeurs pour proposer aux clients une nouvelle segmentation de la viande bovine en adéquation avec la demande des consommateurs. Voilà l’une des conclusions tirées par les éleveurs de la Fédération nationale bovine à l’issue de leur congrès, qui se tenait les 3 et 4 février 2016 à Bourg-en-Bresse.

« Aujourd’hui, nous ne donnons pas envie aux citoyens de manger de la viande », regrette Cédric Mandin, administrateur de la FNB et éleveur en Vendée. Mal adaptée à la demande, la segmentation actuelle des morceaux de viande faciliterait la dévalorisation des produits, et donc la baisse des prix proposés aux éleveurs.

Selon la FNB, il faudra pousser la réforme de la segmentation assez loin : « il faut segmenter aussi le steak haché ». L’objectif est d’imposer aux consommateurs un choix vers les races à viande, y compris quand ils achètent des viandes hachées, composées pour la grande majorité des morceaux les moins nobles, et donc les moins chers et les moins valorisés pour les producteurs. Cette segmentation semble d’autant plus nécessaire que le steak haché est le produit dont la consommation augmente fortement, à l’inverse des autres produits carnés bruts, dont la consommation diminue.

Pour Julien Bigand, des Jeunes agriculteurs, « les acteurs de la filière n’ont pas voulu se remettre en question. Rien n’a été fait, notamment en recherche sur le marketing et la commercialisation. »

Par ailleurs, les producteurs doivent pouvoir compter sur la confiance des consommateurs. « 85 % des consommateurs ont confiance en nous », assure Cédric Mandin, de la FNB, mais c’est un capital insuffisamment exploité. « Il faut arriver à mettre en valeur cette confiance sur les étiquettes. » Dominique Marmier, président de Familles rurales, n’est pas si optimiste. « Avec l’affaire des lasagnes à la viande de cheval, certains consommateurs ont perdu confiance. » Le responsable de l’association de consommateur conseille aux éleveurs d’informer davantage les citoyens sur les modes de production. Avis partagé également par Jean-Claude Bévillard, vice-président de l’association France nature environnement.

Rejoint par plusieurs éleveurs congressistes, Gilles Gauthier, président de la Fédération nationale de l’industrie et des commerces en gros des viandes, considère qu’il faut se concentrer sur l’export et les débouchés des marchés publics. « La SAS France viande export (ndlr, la nouvelle plateforme commune pour exporter) est en place, mais elle n’a encore rien vendu. Le développement de l’export est essentiel. Car cela désengorgera un peu le marché intérieur et nous valorisons bien les produits auprès des pays du pourtour méditerranéen. »

L’industriel croit aussi aux débouchés offerts par les marchés publics. « Il faut décadenasser les marchés publics tout de suite ! » Par le développement de l’export et les marchés publics, il estime possible un désengorgement du marché intérieur, avec une conséquence positive sur les prix.

Reste que ces dossiers structurels n’avanceront qu’en concertation avec tous les acteurs de la filière. Or, invité aux tables rondes organisées par la FNB, Jean-Paul Bigard, le patron du groupe éponyme, leader sur le marché, était le grand absent à Bourg-en-Bresse. Les éleveurs n’ont pas manqué de le dénoncer. « Se faire envoyer « chier » sur tous ces dossiers par le leader du marché, ça suffit ! » a déploré Jean-Paul Fleury, dans son discours de clôture.

L’importance de concrétiser des mesures structurelles ne peut pas, par ailleurs, faire oublier aux éleveurs l’urgence de mesures concrètes d’envergure. « Nous n’accepterons pas de revenir l’an prochain au congrès de la FNB sans qu’il y ait eu des actes forts. Nous sommes asphyxiés », a crié un éleveur en colère. « Les distributeurs doivent se débrouiller pour remonter les prix de 70 centimes d’ici trois semaines, a complété Pascal Lerousseau, président de la FDSEA de la Creuse et coordonnateur du berceau des races à viande du grand Massif central. Sinon, nous reviendrons vous voir, mais pour bloquer vos centrales d’achat. »