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[Reportage] Commercialisation

Se former avec pilotersaferme.com, pour vendre ses grains plus sereinement


Communication agricole le 23/03/2017 à 18:25
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J’ai suivi pour vous une journée de formation avec Roland Zimmermann, cofondateur de Pilotersaferme.com, et des agriculteurs d’Eure-et-Loir désireux de remettre en question leur façon de vendre leurs récoltes. Objectif : se rendre compte qu’il est possible de passer moins de temps pour vendre ses grains, avec une stratégie plus claire, et en considérant un risque prix de plus en plus important.

Pour vendre son stock de blé, qui ne s’est jamais dit, en regardant les cours, qu’il attendrait finalement le lendemain en espérant que le prix grimpe de quelques euros par tonne ?

Dans une petite salle municipale de Brou, commune d’Eure-et-Loir à la lisière du Perche et de la Beauce, ils n’étaient que quatre autour de la table. Quatre céréaliers à consacrer une journée de formation à la commercialisation. Face à eux, Roland Zimmermann, cofondateur de Pilotersaferme.com, déroule son argumentaire bien huilé, et plutôt convaincant.

« Depuis l’arrivée des marchés à terme, il y a dix ans, et de la hausse de la volatilité des prix, je me suis rendu compte que vous passiez beaucoup de temps à suivre les cours, à tenter de faire le tri dans le flot quotidien d’informations que vous pouvez recevoir », explique cet ancien consultant au CerFrance de l’Yonne aux agriculteurs. Et surtout, il est difficile de faire le tri entre toutes ces informations et vos émotions. »

Les participants se retrouvent très vite dans les propos du formateur. « La commercialisation, c’est de plus en plus difficile. Je fais souvent au feeling quand je vois que les prix montent, en tenant compte évidemment de mes besoins de trésorerie », raconte Mickael Meunier, venu avec sa compagne. Tous deux exploitent 155 ha de blé, orge, colza et maïs. Le couple stocke toute sa production, sauf le maïs, et vend en direct à un négociant ou à un meunier.

Assis à côté d’eux, Bertrand partage aussi son expérience : « Je calcule mon prix objectif et mon prix de revient. Mais ça reste difficile de se dire qu’il faut vendre quand les cours atteignent le prix objectif. On est toujours tenté d’attendre un peu pour espérer gagner plus. Mais parfois, au lieu de gagner 1 €/t, on en perd 2 », explique-t-il, lui qui gère près de 200 ha de grandes cultures. Le constat est le même pour Jack. « La commercialisation est souvent source de tension avec mon épouse. Vendre ? Ne pas vendre ? C’est toujours la même question. »

« La commercialisation est anxiogène », résume Roland Zimmermann. Et c’est, selon lui, tout à fait justifié : « Le principal risque pour l’agriculteur, ce n’est pas le rendement à la récolte, c’est le prix ! Gérer 250 ha de céréales, c’est aussi risqué que d’avoir un portefeuille d’un million d’euros en bourse. » Sur une campagne, la variabilité du chiffre d’affaires, en blé, peut s’avérer énorme : avec un faible rendement de 6,4 t/ha et un faible prix de 121 €/t, vous obtenez 778 €/ha. Mais avec un rendement de 7,7 t/ha – soit seulement 20 % de plus – et un prix de 198 €/t, vous obtenez 1 532 €/ha, soit quasiment le double de chiffre d’affaires.

Commercialiser ses grains sans stratégie, c’est partir à la guerre sans plan de bataille !

Face à ce risque, les agriculteurs passent beaucoup de temps à se renseigner sur les prix, à passer des appels auprès de leurs acheteurs. Selon un récent sondage en ligne, 30 % des céréaliers et polyculteurs-éleveurs passent plus de 30 minutes par semaine à la commercialisation de leurs grains.

Et Roland Zimmermann de questionner les producteurs : trouvez-vous utile de regarder tous les jours les cours ? Sur une campagne, vous allez effectuer quatre ou cinq opérations. Tout le temps que vous aurez passé à regarder les cours sans appuyer sur le bouton « je vends » n’est que de la perte de temps.

Le risque de rendement, c’est plus ou moins un écart de 20 % par rapport à votre moyenne quinquennale. Mais le risque prix, lui, est trois ou quatre fois plus élevé !

Plusieurs fois pendant cette journée de formation, le spécialiste insiste sur un point : « Définir une stratégie de commercialisation est la base incontournable ». « Peu d’exploitations n’ont pas de capital assurance pour gérer le risque prix. Et parmi ceux qui gèrent leur commercialisation, neuf agriculteurs sur dix n’ont pas de stratégie, regrette-t-il. Et la plupart de ceux qui en ont une n’arrivent pas à formaliser leurs choix de décision, alors que, pour des aspects réglementaires notamment, les producteurs le font dans plein de domaines techniques de leur quotidien.

Roland Zimmermann recommande ainsi aux producteurs « de fixer une stratégie et un prix objectif par moisson et par culture, en anticipant les futurs besoins de trésorerie, en préparant des scénarios imprévisibles ». Mais aussi de profiter de la période de commercialisation la plus longue. « Une campagne de commercialisation peut se mener sur 22 mois, dès l’automne précédent, et jusqu’en mai de l’année après moisson. »

De plus, l’expert conseille de tirer les conséquences d’un risque prix de plus en plus élevé. « Si le risque prix est désormais votre risque numéro un, il faut peut-être envisager d’y consacrer un capital assurance. Cela peut aller de de 5 à 10 €/t. » Autrement dit, les agriculteurs sont invités à couvrir le risque prix, à la hausse comme à la baisse, avec des options, des calls ou des puts. « Prendre une option qui vous coûte 7,5 €/t, soit 30 €/ha, c’est comme décider d’aller traiter votre blé. Mais pour cette opération-là, vous ne vous posez même pas la question de la faire ou pas. »

Après la théorie, la formation se poursuit avec une après-midi de pratique. Roland Zimmermann se sert de son outil – pilotersaferme.com – pour faire un exercice réel sur toute une campagne de commercialisation. « Les pilotes d’avion font bien des centaines d’heures en simulateur avant de prendre les commandes d’un appareil. Pourquoi pas les céréaliers pour la vente de leurs grains ? »

Après avoir fixé leur objectif de vente, les agriculteurs voient défiler, semaine par semaine, le cours du blé. Et à chaque semaine nouvelle, ils doivent dire s’ils se positionnent sur le marché, soit pour vendre du physique, soit pour prendre une option de couverture.

Sur l’écran devant eux, le graphique affiche les prix, et livre une note d’opportunité – pour vendre ou non – de 1 à 10, selon la tendance du marché, évaluée par un algorithme mathématique. « Nous nous sommes inspirés des logiciels utilisés par les traders pour construire un modèle 100 % mathématique qui analyse une multitude de données de marché, en fonction de ce qui s’est passé ces dernière années », explique le formateur.

A la fin de l’exercice, les différentes stratégies suivies, avec un facteur émotionnel plus ou moins important, aboutissent à des résultats très différents en termes de chiffre d’affaires.

« Ça remet en question, débriefe Bertrand, un autre agriculteur participant. Je n’avais jamais utilisé les options. C’est vrai que ça pourrait être intéressant. » L’objectif de Roland Zimmermann est atteint : remettre les agriculteurs en question et bousculer leurs habitudes souvent chronophages et ne permettant pas d’obtenir un résultat de vente optimal. « Vendre ses grains sans stratégie précise, c’est comme partir à la guerre sans plan de bataille. »

Outre multiplier les formations, l’objectif du cofondateur de pilotersaferme.com est d’améliorer encore son offre de service, en donnant des conseils plus personnalisés en fonction de l’aversion au risque de chaque agriculteur et de ses données personnelles. Et pour leur permettre de s’exercer à la commercialisation de leurs grains, pas seulement pendant une journée de formation, un « serious game » devrait sortir courant 2017.