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Luzerne déshydratée

La filière veut développer la production sur 40 000 hectares supplémentaires


Grandes cultures le 07/02/2018 à 07:25
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La filière luzerne déshydratée cherche à se développer sur 40 000 hectares supplémentaires pour répondre à un marché français structurellement déficitaire en protéines végétales. Les marchés à l’export, notamment vers les pays du Moyen-Orient, offrent aussi un important potentiel pour les producteurs français.

Il y a de la place pour qui veut ! La filière luzerne déshydratée, emmenée par Coop de France Déshydratation et Désialis, leader européen de produits déshydratés, entend contribuer fortement au plan de filière protéines végétales et aux recommandations des États généraux de l’alimentation vers une plus grande autonomie protéique de la France. Mardi 6 février 2018, leurs représentants ont indiqué vouloir augmenter les surfaces cultivées et déshydratées de 40 000 hectares dans les années à venir, pour passer ainsi de 67 000 à plus de 100 000 hectares, soit une hausse de 66 %. Avec cet objectif, la filière recherche l’équivalent d’environ 4 000 nouveaux producteurs. Sur le plan industriel, cette hausse nécessiterait 6 à 10 usines supplémentaires et 800 emplois.

Les bons chiffres de la campagne de production 2017 boostent les ambitions des représentants. « La production 2017 s’établit à 850 000 t, soit une hausse de 14,1 % par rapport à 2016. Les surfaces sont en hausse de 3 % à 66 720 ha. Les rendements ont progressé de 5,6 %, à 12,5 t/ha.

« La France est structurellement déficitaire en protéines végétales, a rappelé Eric Masset, président de Coop de France Déshydratation. Il y a une demande croissante en protéines non-OGM. En réponse à la demande sociétale de produits agricoles toujours plus qualitatifs, comme en production laitière, les agriculteurs sont de plus en plus sensibles à la qualité de la ration de leurs animaux. Ils considèrent aussi davantage l’argument de l’intérêt de la culture dans leur assolement. »

Pour répondre à cette demande, Désialis, qui assure 75 % de la production de luzerne déshydratée, verra d’ailleurs ses 17 usines dédiées certifiées  « sans OGM ».

Dans ce marché, celui de la luzerne certifiée biologique a aussi un bel avenir, selon les représentants. « Nous sommes déficitaires de 8 000 à 10 000 tonnes en luzerne biologique. Ce serait bien que la France puisse, à terme, satisfaire la demande. » Pour les producteurs, la valorisation supplémentaire est de l’ordre de 15 à 20 % par rapport à la luzerne conventionnelle.

Et malgré un déficit chronique en protéines végétales – la France importe environ 40 % de ses besoins – la filière Déshydratation veut poursuivre sa stratégie de diversification des débouchés, et notamment sa conquête de marchés à l’export.  À la fois grand producteur et grand consommateur, l’Arabie Saoudite a acté, à compter de 2019, l’interdiction de l’irrigation des fourrages, et donc, de ce fait, l’interdiction de la production de luzerne sur son territoire. Une décision de raison pour limiter la consommation d’eau. « Cela engendrera un débouché supplémentaire de 2,5 Mt par an pour nourrir leurs grands troupeaux laitiers », explique  Serge Faller, directeur de Désialis.

Les pays de la péninsule arabique, de même que l’Iran sont preneurs de luzerne en balles plutôt qu’en pellets, pour apporter à la fois les protéines et les fibres à leurs cheptels. « Nous développons nos produits en balles en fonction des marchés. Mais cela nécessite de lourds investissements. »

Si les marchés, tant en France qu’à l’export, sont porteurs, la filière reste tributaire de la conjoncture d’autres marchés. « La baisse des cours du lait nous a fortement pénalisés », explique Eric Masset. Avec de meilleurs prix des produits laitiers pour nos clients éleveurs, la demande en luzerne déshydratée repart. »

La fin des quotas betteraviers « peut aussi changer la donne ». Avec la baisse des prix du sucre et de la betterave, l’arbitrage des agriculteurs dans les zones de production pour leur assolement peut être favorable à la luzerne.

Dans ce contexte, les représentants de la filière luzerne attendent une politique en leur faveur à la hauteur de leurs ambitions. « La prochaine réforme de la Pac après 2020 doit comprendre des aides aux investissements dans les outils de production. » Et plus globalement, ils souhaiteraient une « rémunération des aménités environnementales positives de la luzerne. »

Parmi ces aménités positives, les représentants mettent en avant le bilan carbone positif de l’ensemble de la filière et dénonce, à l’inverse, la politique de gestion des quotas de gaz à effet de serre. « Cette politique va se durcir par une hausse des taxes, en tenant compte uniquement des émissions de GES des usines, alors que, côté production, la luzerne participe à la captation du carbone dans le sol. »

En outre, une bonne politique en faveur de la protéine végétale commencerait aussi, selon les représentants de la filière, par une formation adaptée des futurs agriculteurs. « Techniquement, on apprend aux jeunes le modèle maïs-soja au lieu de leur apprendre l’utilisation de luzerne dans la ration des troupeaux. Les pouvoirs publics devraient orienter les cycles de formation. »