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Témoignages moisson

La météo a pénalisé les cultures, en quantité comme en qualité


TNC le 11/07/2018 à 05:58
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Les conditions météorologiques ont été particulièrement éprouvantes pour nos agriculteurs. La grêle, les pluies torrentielles, les rafales de vent, les coulées de boue ont réduit les rendements, notamment pour les cultures de colza et d'orge d'hiver.

Chez Florent, la totalité des cultures a été grêlée. Il a repris l’exploitation de son père, en majorité des craies champenoises et aussi 30 ha en région Perthois, où le sol est argileux et limoneux. Les épisodes de grêle ont débuté cette année chez Florent le 11 mars sur une parcelle de colza de 9 ha. Cette dernière étant excentrée de son exploitation de 152 ha, il n’a su que tardivement qu’elle avait été touchée par la grêle et s’est retrouvé hors délai pour les assurances… L’intensité de la grêle fut telle que les grêlons bloquaient l’ouverture de sa grange ! La vision était apocalyptique, avec des feuilles de colza totalement hachées. Mais puisque cette plante compense bien, de nouvelles feuilles se sont formées durant le printemps et la récolte reste honorable (38 q/ha).

Le 29 avril, nouvelle catastrophe : des trombes d’eau, suivies de grêle, avec des grêlons mesurant jusqu’à 30 cm ! Heureusement, son colza y échappe, mais ses voisins dans le village sont grêlés à 90 %. Cela touche toutes les cultures de la commune, en particulier les betteraves, massivement détruites. Sur les 130 000 pieds à l’hectare plantés par Florent, il n’en reste plus que 25 000 ! Il faudra replanter. Côté escourgeon, sur les 18 ha, les tiges sont pliées en deux et la plante aura du mal à produire un épi : l’expert établit une perte de 20 %.

Sur les 11 ha d’orge de printemps, 50 mm d’eau se déversent en 10 min (soit l’équivalent des précipitations du mois entier !). Ces aléas climatiques jouent sur la qualité de l’orge : les brasseurs, ses acheteurs, veulent de gros grains, et le reste part pour l’alimentation des animaux, à un tarif évidemment moindre. Comme l’orge de printemps a été semée tard, la culture était à peine levée  lors de l’orage. La grêle a coupé les feuilles mais, comme pour le colza, la plante en a fait de nouvelles. Au final, le rendement ne baisse que de 8 %.

Ce printemps très pluvieux (400 mm d’eau, soit près du triple de la normale) a raviné les sols. Or, dans la Marne, il n’y a que 20 à 30 cm de terre, après c’est la craie : il faut alors remonter la terre au télescopique. Malheureusement, lorsque la terre est partie chez le voisin et que ce dernier a déjà emblavé, il n’y a plus rien à faire. Florent précise : « La pluie, j’arrive à gérer. Si je ne peux plus entrer dans les champs, je fais autre chose, je m’organise. Mais la grêle, c’est tellement dévastateur ! On subit, on ne peut pas agir. Il m’a fallu 15 jours pour digérer et reprendre le taureau par les cornes. » Il sera malheureusement victime de la grêle une troisième fois, le 30 mai. Là, ce sont les maïs qui seront les plus impactés. L’agriculteur ajoute : « De toute sa carrière, Papa n’a jamais vu de grêle si tôt dans l’année et dans de telles quantités. Un orage au mois de juin, cela arrive parfois mais en mars… On peut s’assurer contre les aléas climatiques du style orage, ravinement, mais c’est très onéreux et normalement cela ne devrait pas servir tous les ans. »

Dans un autre département, en Charentes, Vincent Buard, un jeune cultivateur installé à Juillé, nous fait un récapitulatif des intempéries que son exploitation de 75 ha a subies. Le 23 mai, de la grêle sèche touche sévèrement son orge (4 ha sur 6). À cela, il faut ajouter 300 mm d’eau qui se sont abattus en 24 jours, contre 70 mm l’année dernière. Au final, la récolte a diminué de 8 q/ha. En début d’année, ses 5,5 ha de colza d’hiver implantés sur des sols argilo-calcaires subissent 40 jours d’averses intenses (160 mm au lieu de 60). Situation fatale pour le colza, l’hydromorphie des sols noyant de nombreux pieds. Au final, Vincent perdra 10 q/ha.

Mais les dégâts jouent aussi à plus long terme. « Ces pluies torrentielles repoussent, voire empêchent les traitements », explique le producteur. « Ainsi, en février, impossible d’appliquer l’herbicide car les sols n’étaient pas du tout portants. Résultat : toutes mes parcelles sont excessivement sales, d’où un surcroît de travail. Dès la récolte, il faudra broyer, puis déchaumer avec un covercrop. » Vincent n’est ni assuré contre la grêle, ni contre les aléas climatiques, car il trouve les assurances trop chères et le système d’indemnisation trop rigide. Il précise : « Si j’avais été assuré pour mon orge grêlée, je n’aurais pas eu d’indemnité car je suis quand même 5 q/ha au-dessus de la moyenne décennale. Je ne suis pas convaincu de la rentabilité de ce type d’investissement. »