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[Analyse] Conjoncture laitière

Des pizzas, de la chaleur et du pétrole pour booster le prix du lait


TNC le 27/09/2018 à 06:00
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Consultante chez Agritel et spécialiste des produits laitiers, Marion Cassagnou explique comment les pizzas, le pétrole, mais aussi la sécheresse en Europe du Nord, vont impacter les marchés des produits laitiers dans les prochains mois, et donc, la tendance des prix payés aux producteurs.

« La sécheresse qui a sévi durablement dans les pays du nord de l’Europe a – et aura – un impact certain sur les marchés laitiers », a expliqué Marion Cassagnou, consultante chez Agritel, spécialiste des marchés laitiers, lors d’une émission de la SpaceTV à la mi-septembre, lors de l’édition 2018 du Space à Rennes.

« Dans les années passées, les sécheresses en Europe concernaient davantage les pays du sud de l’Europe, des pays de moindre importance pour l’offre européenne et mondiale de lait. Or, la sécheresse 2018 a surtout touché l’Irlande, le Royaume-Uni, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Danemark, qui représentent ensemble 55 % de la collecte laitière européenne », a-t-elle poursuivi.

« Cette sécheresse en Europe a touché la production laitière des mois de juillet et août, en Allemagne, Pays-Bas, Irlande et en France aussi. Elle va aussi avoir un impact sur la collecte laitière européenne pour les prochains mois, à cause de moindres fourrages récoltés. Certains pays comme l’Irlande n’ont pas de maïs ensilage. La durée de la pousse de l’herbe d’ici la fin de l’année va être déterminante pour les producteurs irlandais. »

Selon elle, le coup de chaud européen ne sera pas sans conséquence sur le taux de matière grasse du lait. « Si on observe des taux de matière grasse plus faibles, cela va impacter – à la hausse – le cours du beurre. »

Cet impact sur la production de matière grasse sera d’autant plus à suivre que la demande, elle, est à la hausse. « La matière grasse, ce n’est pas que du beurre. La consommation mondiale de pizzas augmente, entraînant une demande croissante de mozzarella industrielle. Les exportations de crème sont également en hausse. »

Pour la poudre, moins de stock public, plus de stock privé

Sur le marché de la poudre de lait écrémé, le niveau de stock public européen reste un élément déterminant. « Chaque mois, la commission européenne remet des volumes sur le marché. En août, 30 000 tonnes ont été vendues à un prix avoisinant les 1 200 €/t. »

Mais si le stock à l’intervention est en train de baisser, doucement mais sûrement, cela ne signifie pas que les stocks de poudre diminuent ! « Les opérateurs stockent davantage de poudre fraîche et préfèrent acheter à bas coût de la poudre issue du stock public. Ils revendront leur propre stock plus tard, quand les prix seront meilleurs. » Or, autant le niveau de stock public est connu, autant la quantité de poudre stockée par les opérateurs privés est inconnue.

Quand un niveau de stock est connu, comme celui à l’intervention, cela fait pression sur les prix car nous savons qu’il faudra le dégager un jour. Des stocks privés dont les niveaux sont inconnus ont moins d’influence sur les marchés.

Autre élément important souligné par Marion Cassagnou : la hausse du prix du pétrole. « Quand le prix du baril grimpe, les pays pétroliers en profitent pour importer davantage de poudre de lait. » Soit un facteur haussier supplémentaire sur le prix du lait.